Voir la misère, entendre les peines,
Chaque jour affronter la dure réalité,
Consacrer une vie à pleurer pour l’humanité.
Non ! Sur terre il faut chanter la même et joyeuse rengaine.
À nos portes alors si facilement la misère s’oublie.
Flottent les nouvelles, et c’est pour mieux te choquer, mon enfant
La tristesse, l’horreur quotidienne t’empêchent de manger et te lassent.
Entends-tu encore les gens qui lancent des cris,
Des appels à l’aide pour qu’un seul vienne les sortir du néant ?
Ton assiette à toi sans cesse se remplit et puis tout ça passe.
Ton monde ennuyé et dérangé oublie vite les vraies valeurs
Ayant ses yeux qui se tournent pour ne rien voir,
Ses oreilles qui se bouchent pour ne point entendre
Et des malheureux devant les sourds, les aveugles meurent
Leur trop grande différence les a poussé loin de ton savoir
N’y a-t-il pas de bonnes manières qu’il faut surtout apprendre ?
Si tu veux connaître et t’abreuver des cultures et des lois,
N’oseras-tu pas t’insurger ? Toi qui reste un petit mouton qui suit
Ton maître Panurge quand il ordonne, lui qui doit t’enseigner la vie.
De son domaine ne restera-t-il pas une parcelle pour deux ou trois ?
Quand un seul décide pour l’intérêt de la populace
A-t-il envisagé la place qui sera faite pour chacun d’entre nous ?
Bien qu’honorable son désir d’apporter le bonheur en masse
Maître Panurge en oublie tous les chemins qui seront pris de nous.
Tel un aigle, son magnifique envol lui fait toucher les hauts cieux
Il ne voit qu’un ciel bleu, en bas la vie, elle, elle continue toujours.
Il se posera sur une haute montagne à la fin du jour
Comme tout ce qui vit, il se nourrira, ses ailes reposera un peu.
Tout le monde agit ainsi, je le crois, sur notre bonne vieille terre.
Seul maître à bord de son vaisseau, ne pas s’abaisser à descendre,
Volant sa course dans un ciel si bleu, si loin des autres en misère.
Regarder sans voir, oubliant notre paire d’yeux, ça peut encore attendre.