•  

     

     

     

    Il avait une quinzaine d'années et une passion : les Yoyos.

     

    Il les collectionnait et les pratiquait, c'était un jeu amusant, c'était un moyen de s'échapper de la réalité si décevante. Il avait des Yoyos de toutes sortes, toutes couleurs, des plus simples aux plus sophistiqués mais il avait une tendresse particulière pour le premier offert par son grand-père un soir de Noël, l'origine de sa vocation, un beau Yoyo en bois de couleur rouge et jaune.

     

    À son âge encore plein de rêves il voyait que les adultes étaient souvent si menteurs, si difficiles à comprendre et avait trouvé le moyen de les épater et de contrôler sa petite vie naissante, il allait leur en montrer à tous. S'il fallait suivre les adultes, il se trouva un hobby, le Yoyo, ce jeu d'enfant de son âge, il en deviendrait un expert, il se l'avait promis et un spécialiste du jeu même, comme certains adultes le sont dans leur domaine, il serait ainsi remarqué, adoré.

     

    Il copia les grands mais à sa mesure, à son échelle, quels efforts de l'enfant qui imitait l'adulte avec brio ! L'enfance est un merveilleux jardin qui reproduit la faune et la flore adulte. Les Yoyos jonglaient entre ses doigts, il avait la maîtrise du jeu, c'était lui le maître de ses outils, il les dirigeait, les pilotait comme il l'entendait, personne ne lui donnait de conseils ou d'ordres, il n'avait qu'à faire selon son bon vouloir.

     

    Il ne s'en privait pas, c'était lui le professeur par moment. Beaucoup de ses camarades voulaient jouer avec lui et il lui fallait leur montrer comment utiliser ses Yoyos, tous l'avaient vu faire dans la cour de récréation. Eux aussi voulaient essayer, même une fois son petit instrument magique et captivant, tout comme lui l'avait fait, ils espéraient épater la galerie. Le garçon aux Yoyos montrait avec art et manière l'utilisation de son instrument, les doués, ceux qui savaient y faire rejoignaient son club, ils étaient admis à ses côtés, il se créait ainsi son petit monde à lui.

     

    Imiter une vie de grand c'est imiter aussi ses qualités et ses défauts.

     

    Les filles le chouchoutaient, elles l'adoraient, elles lui couraient après pour qu'il leur montre à elles aussi l'instrument baladeur, et les Yoyos faisaient de ces va-et-vient dans ses mains, ils déambulaient, voyageaient, c'était magique. C'était le bonheur pendant les quelques instants où chacun pouvait à loisir regarder, manipuler ces petits riens et cela rendait le garçon aux Yoyos encore plus charmant.

     

    Nombre de ses camarades étaient venus dans sa chambre pour contempler les Yoyos, les essayer, prendre quelques leçons que notre garçon offrait généreusement pour le plaisir de faire plaisir, cela lui permettait d'avoir de nouveaux adeptes. Bienvenu au club. Toutes les classes qu'il avait fréquenté s'intéressèrent à ces petits riens qui montaient et descendaient sans cesse. Il était aimé pour ça, car il savait montrer artistiquement l'utilisation de ses Yoyos. Il savait captiver son public, l'impliquer.

     

    Un jour pourtant, il rencontra la concurrence d'une fille, si mignonne et nouvelle dans l'école, elle venait d'Australie où ses parents vécurent avant de revenir en France pour leurs affaires (ils étaient éleveurs de moutons) , du séjour dans ce pays d'en dessous elle avait ramené des tas de boomerangs.

     

     

    Mais la fille aux boomerangs, c'est une autre histoire ...

     

     

     

     


    14 commentaires
  •  

     

     

     

     

    Les humains sont bien chanceux, ils ont tout sur cette planète, ils y sont les rois de cet univers terrestre avec tout pour y vivre heureux et pourtant, pourtant il y a des inégalités, des guerres, des crimes, des ignominies inhumaines......

     

    La terre a été faite au départ d’animaux, d’espèces animales nombreuses et variées pour y prospérer et procréer. Tout se passait bien, certaines bêtes se nourrissant d’herbes, d’autres chassant, tuant et mangeant des animaux d’autres espèces ainsi se régulât la vie. Et au bout de ce chemin animalier la mort, chose naturelle, qui ne peut être arrêtée, elle arrive et s’installe même à la fin d’une longue existence d’animal.

     

    Tout avait été bien pensé sur la petite terre de nos ancêtres, ah oui, nos précurseurs ne sont pas encore là, nous les humains, les terrestres arriverons plus tard. Le destin de la terre commençait. Nos aïeuls n’ont pas connu cette vie d’avant.

     

    Un Dieu, celui que vous voudrez bien vous nommer et aimer, et adorer même, se décida, un jour d'ennui, peut être, sait-on ?, d'une pensée de génie, d'une pensée divinement virtuose de se faire un miracle et créa alors un humain et sa compagne pour peupler de bons hommes la terre qu’il avait faite. Oui, il manquait quelque chose de charmant, de divertissant sur cette planète, et qui soit à son image divine, dit-on, oui, sa Sérénissime Divinité voulait encore se créer un dernier caprice pour cette belle petite boule bleue.

     

    Et Adam et Eve arrivèrent……ils vivaient heureux, ces chers enfants de Dieu en un jardin de paradis mais cela ne dura point, en effet l'ennemi malin de ce Seigneur, un certain petit diable se posa en ce paradis pour troubler la belle aventure, les tenta et les fit aller au delà de ce que Dieu le Père leur demandait et leur ordonnait, ils pêchèrent, les pauvres bougres, ils furent chasser du pays des merveilles et durent vivre d'amour et d'eau fraîche loin de leur habitat prospère d'avant …........ ils eurent des enfants dans la douleur pour maman Eve et ainsi arrivèrent les deux frères Caïn et Abel….la suite de l’histoire, je n’inciterai pas vous la connaissez, allez relire la Bible pour informations……. toute l'Histoire de notre supposée humanité y est bien exposée.

     

    Depuis le premier crime, le pêché originel de ce fruit défendu puis l’horrible fratricide de Caïn, tout se déboussola : l’humain absorba tous les pêchés qui gravitaient par ci, par là, il devint l’abominable homme qui reste et demeure toujours en nos jours, nos temps fous d'horribles garnements pas prêts de sortir de leur sacrilège.

     

    Petit sur la planète, l'humain se croit Maître de l’Univers, il est l’invincible et veut imposer sa loi, sa vérité, sa façon de penser…il n’est qu’une fourmi pour Dieu mais il s’imagine lui d'être un Géant tel Atlas portant son monde, lui n’ayant que sa manière, ses actions sur le dos.

     

    Je me plais, je me fais donc un devoir d'imaginer l'homme comme une fourmi coincée entre les doigts de Dieu.

     

    Il est alors si facile de s'écraser.

     

     

     

     

     

     


    15 commentaires
  •  



    Quel beau métier il fait donc là, Monsieur le Préposé des Parcmètres. Entretenir les machines qui font payer aux gens le droit de loger leur véhicule en ville quelque temps. Récupérer les pièces qui ont été logées dans le ventre gourmand des boîtes à sous.


    C’est ce qui s’appelle l’impôt urbain de nos temps modernes.


    Monsieur le Parc-maître est, par excellence, un employé modèle, si l’argent donne le droit, l’argent peut tout, l’argent apporte tout, son droit c’est l’argent. Il sacrifie tout à son métier, il ne vit que pour l’argent qu’il rapporte, qui lui rapporte.

    Il bichonne, caresse ces petites boîtes, y tenant plus qu’à la prunelle de ses yeux. Il serait chômeur sans elles, le pauvre.

    Prince dans sa ville, il se jette sur ces machines, sujets de son soi-disant royaume de prince consort, consorti de la cuisse de Jupiter. Il frémit d’un indescriptible bonheur dés que l’argent emplit les sacs placés sous les parcmètres. Pourtant notre prince n’est rien d’autre qu’une fripouille, un de ces gagne-petit, pleine erreur de petite frappe. L’agent des parcs se croit malin, l’ignoble profiteur, goujat de première, sous des dehors de respectable agent administratif, roule la ville, roule l’administration.


    Oui, il roule dans un beau cabriolet couleur rouge.

    Monsieur n’est jamais seul à l’ouvrage, le Prince consort a une consœur, il est toujours suivi de Madame. Où l’un il va, l’autre le suit. Le couple est admirable, un couple de légende dont il faut présenter l’autre moitié : elle est femme au foyer mais jamais chez elle quand monsieur travaille, une épouse qui talonne pas à pas le conjoint fonctionnaire. Laissant ses tâches ménagères pour préférer suivre son double d’époux. Il lui faut bien une raison, un motif pour s’obstiner à escorter ainsi le mari.

    Voici donc l’ignoble et lucratif stratagème du couple glorieux, oui glorieux car ils resteront gravés dans les mémoires des lecteurs, enfin je l’espère, ils en valent la peine.

    La dame transporte les sacs à récolter les pièces du sieur. Certains de ces sacs sont à moitié vide mais un seul est toujours et largement plein, celui-ci est tellement rempli qu'il pourrait s’en découdre les coutures.
    Monsieur et Madame redonnent à l’administration les sacs à moitié vide, alors, ils se régalent du reste, un simple et petit sac qui, lui, est celui plein à ras bord.

    Monsieur et Madame prirent un soir un train de nuit pour des vacances dans le Sud. Madame a peur de l’avion et préfère un contact avec le sol. Ne sortant leur superbe voiture que pour briller en société, et uniquement dans leur ville, la formule du train leur plaisait agréablement pour les vacances. Ce soir-là, donc, pendant un sommeil lourd, lourd comme un lingot d’or (d’horodateur, devrais-je dire), elle se confessa, ayant quelque remords en ce chaud soir d’été, agitée par le train-train, enveloppée de beaux draps de soie rose.

    Dans la couchette supérieure, je ne pus m’endormir tout de suite mais je ne pus m’empêcher aussi d’entendre la brave dame car elle avait le verbe haut.

    Mais au fait, le seul cabriolet rouge flambant neuf que vous connaissez n’est-il pas celui de vos amis ?

     

     

     


    18 commentaires
  •  

     

    Oyez, oyez braves gens la triste histoire de Kandirah la belle.

     

    Ce pays imaginaire que nul ne trouvera, ne pourra découvrir, mais cherchez, cherchez toujours, cherchez encore ...

    peut-être qu'un jour ...

     

    La belle Kandirah était un vaste et splendide pays aux profondes vallées, aux grandes étendues d'eaux, d'immenses plaines, la nature y faisait la joie de tous, des villes avaient été aménagées pour être en accord avec cette nature, ni grandes ni petites, des villes dans la juste mesure, pourrait-on dire ! La population était fière de posséder ses nombreuses petites villes si bien éparpillées dans tout le pays, si bien adaptées au goût de chacun, car chaque ville avait son attrait, sa saveur, son originalité, le peuple n'avait qu'à choisir sa ville, ou plutôt ses villes car on avait doublé, triplé ... certaines d'elles pour que la population ne s'installât pas en nombre dans une seule et même ville et n'augmentât pas trop la taille urbaine qu'il fallait respecter.

     

    Le bon peuple de Kandirah vivait donc heureux sans le moindre souci ni la moindre gêne car la royauté contribuait à l'harmonie des Kandirahiens, c'était un devoir royal de gouverner avec justesse, équilibre et gentillesse, le pays était si immense que de nouvelles cités étaient progressivement construites, tout était Paradis, tout était sain. Le Roi Victor et la Reine Dolcia en harmonie avec leur peuple, étaient issus d'une grande lignée de souverains justes, bons, pacifistes vivant dans l'amour de leur prochain, vivant pour les autres, le bonheur du peuple passait avant leur propre intérêt, la royauté après les désirs, les besoins, la vie des Kandirahiens.

     

    Kandirah, pays qui me semble merveilleux, une lumineuse oasis de sagesse et d'entente qui avait pourtant la fâcheuse manie d'être un trop beau bonheur pour tous. Le malin, le monstre, l'ignoble malfaisant qui avait toujours régner à l'extérieur de la belle contrée, un jour d'ennui, un jour où il n'eut personne à se mettre sous la dent, notre démon s'intéressa à la belle Kandirah. Par la ruse, et là, cette ruse je ne saurais vous en révéler l'aspect, je ne sais absolument pas comment il a fait, faire le bien je sais vous l'expliquer, faire le mal, je ne comprend pas, notre diable s'installa donc à Kandirah.

     

    Oh ! il n'a pas l'air bien méchant. Non ! uniquement un être heureux de voir les autres malheureux, un bon petit diable qui vous fait un croche-pied pour de rire, pour rire de vous voir vous étaler de tout votre long, par exemple, un être si malicieux et coquin qu'il prit l'apparence d'un tout petit problème que le roi et la reine ne purent résoudre qu'avec une bonne et magnifique astuce (car ils étaient intelligents et savaient aisément tourner le mal par le bien, par leur façon de faire le bien) : le roi et la reine ne pouvaient avoir d'enfant, ils étaient les derniers représentants de leur royauté, mais Victor et Dolcia, pour l'harmonie de leur peuple qui réclamait un successeur, décidèrent d'adopter deux garçons, l'un blanc, l'autre noir, à l'orphelinat de Gribourg, capitale de Kandirah.

     

    Le peuple veut un roi, il a donc été décidé qu'il y aurait deux prétendants au trône et seule l'Oracle de la Montagne Verte révélera l'avenir de ces deux enfants royaux, la mystérieuse magicienne Mina saura, le jour où ils la consulteront, qui des deux sera le roi ?

     

    Pour le peuple se fût parfait : l'un des deux garçons deviendrait Monarque au moment de la retraite de Victor, l'autre occupera la fonction de Maître de Justice. La population de Kandirah étant à majorité blanche et noire, le choix était judicieux qu'un enfant représente chacune des deux couleurs.

     

    Ces petits faits, anodins et insignifiants allaient détruire Kandirah.

     

    Au moment où je commence mon récit, les deux princes viennent de fêter leur trentième anniversaire, frères d'adoption, frères de sang, frères de jeux, frères dans la joie et dans la tristesse ... leur trente ans furent fêtés comme si les deux princes étaient de vrais frères jumeaux, ils ne faisaient d'ailleurs pas attention à la différence de couleurs de peau, le noir et le blanc se marient parfois si bien.

     

    Une tradition dans le pays de Kandirah donne à chaque personne qui atteint sa trentième année la possibilité de consulter l'Oracle de la Montagne Verte, une magicienne qui vit seule, recluse dans sa maison et par son aide vous avez accès à votre avenir, vous pouvez ainsi par ses conseils arranger votre destin, votre vie selon la paix, le bonheur de Kandirah, la mystérieuse magicienne est l'âme et la sagesse de Kandirah.

     

    La grande question que tout le monde se posait maintenant c'était lequel des deux princes serait leur roi, lequel pourrait assurer la succession de leur père, car les deux princes n'avaient pas du tout le même caractère, l'un était vif comme l'éclair, l'autre prenait le temps de vivre, l'un était manuel, l'autre intellectuel, l'un savait vous construire tout de ses mains, l'autre raisonnait et philosophait à tout vent, il résonnait plus son intellect que sa raison. Seule l'Oracle pouvait départager les avis et rendre fin à l'angoissante question que tous depuis peu débattaient à en briser l'harmonie si légendaire de Kandirah la belle.

     

    Face à l'Oracle, les deux princes n'osaient pas se regarder, ils se sentaient soudainement étrangers l'un à l'autre, une parcelle d'animosité s'anima face à l'adversaire. Les deux complices d'antan, les deux frères de jadis étaient là se demandant qui serait le roi ? Deux ennemis s'opposaient l'un à l'autre pour une seule et unique fois alors que toute leur vie ne fût que complicité et complémentarité. Ils revoyaient leur jeunesse, ils étaient toujours à se partager mutuellement leurs faiblesses et leurs forces pour mieux gagner sur le destin, à deux on déplace des montagnes.

     

    Les frères allaient enfin savoir à l'instant qui deviendrait le roi.

     

    Mina annonça :

    "Vous serez tous les deux rois, l'un de vous sera roi pendant 5 années puis l'autre lui succédera après sa mort. Le roi sera ..."

     

    Mina ne put terminer sa phrase, elle mourut soudainement avant de révéler l'avenir des deux princes. Sa voix résonnait encore dans l'air, la question flottait dans le souffle de leur haleine saccadée, ils se regardèrent suspicieusement. L'idée que le premier allait mourir en laissant la place à l'autre les fît frémir de terreur, qui devait être le premier, qui allait donc mourir pour l'avenir de l'autre ? Ils avaient tout partager mais pas cette mort, pas la mort, non ils ne pouvaient pas partager la mort.

     

    Personne ne pourrait jamais leur donner la fin de l'oracle de Mina ... elle mourut sans descendance, elle s'était consacrée toute son existence à s'occuper des affaires des autres, à leur annoncer ce qu'ils seraient, ce qu'ils devaient faire, mais elle ne s'était jamais occupé d'elle, aucune famille, aucune fille pour reprendre sa place, ses oracles, sa magie, il n'y aura personne pour achever l'oracle. Elle n'avait jamais songé à avoir une famille et s'assurer une descendance, plus rien à s'offrir, la dernière magicienne du pays de Kandirah venait de mourir partant avec son secret, le lourd secret qui provoqua une guerre fratricide entre les deux princes. Chaos et Mal règnent désormais à Kandirah, chacun des habitants ayant choisi l'un des deux camps, lui jurant fidélité à la mort et maudissant la partie opposée, que de morts, que de guerres, que de mal pour éviter une seule mort.

     

     

     


    18 commentaires

  •  

      

    Comme une goutte de vent quand la pluie souffle, je me suis engouffré dans le plus proche abri trouvé, je voulais échapper à l’orage, haut désespoir.

      

    Je découvre alors, étant entré par inadvertance dans cette librairie ancienne, de beaux livres parmi des tonnes d’occasions. Soudain, loin du monde, j'en oublie tous les tracas quotidiens, je me perds des heures dans cet univers de papier. Je souhaite ne pas être dérangé, je lis, je bouquine, et rien ne me fera sortir de ma délectable lecture. Un livre, est un immense univers placé entre nos mains, restant encore et toujours le seul reflet de l’avis (la vie) d’un auteur. Qu’il soit roman ou essai philosophique, livre d’art ou oeuvrette achetée au hasard en gare... tout livre est un paysage reposant, un pays aux merveilles. Le cœur plein de joie, je venais de découvrir ce monde bien caché et insoupçonné pourtant si proche de moi, là à quatre pas. Tout le monde sait lire, il paraît, faut-il encore savoir quoi lire ?

      

    Certains ne lisent que des journaux pour connaître chaque jour les informations fraîchement déroulées, un petit article se lit vite, ça ne fait pas trop de mal aux yeux, on gagne du temps, alors qu’un roman ou une épopée style "Guerre et Paix" ne peut que vous faire perdre votre temps, il y a trop de personnages, trop de détails, trop de lettres, trop de, trop de... je n’ai pas le temps, vraiment pas le temps à lire ces quelque mille pages, et puis j’ai vu le film (d'ailleurs je dévore aussi les nouvelles à la télé).

      

    D’autres ne jurent que par les classiques. Il faut qu'un livre soit encensé, applaudi par la critique. Il lui faut un minimum de 100 ans d’âge. Il doit avoir fait son chemin parmi le peuple pour être sûr qu’il dira vrai, que je daigne m’y intéresser. Il faut surtout que le livre soit ancien pour en garnir ma vieille bibliothèque de 3 000 âmes dont je n’ai au demeurant jamais tourner une seule page. Comme le bon vin, plus il sera vieux, plus il me semblera bon. Plus il sera vieux et très rare (peut-être ?) plus il sera cher à mon cœur, et cher à mon porte-monnaie aussi, mais j’ai les sous, des sous plein mes poches, ....... alors ?

      

    Enfin, les plus bizarres de ces animaux lectants ou bouquetins, comment appeler quelqu’un qui lit ? (Non, ne l’appelez-pas ! Vous le dérangeriez, n’oubliez pas qu’il est en train de lire), cette race d’animaux qui lisent de tout et de rien. Ils regardent la publicité pour ceci, pour cela, ils gobent et englobent tout et achètent, consomment, s’assomment. Il est vrai que certains prix sont modestes, et puis la publicité pour certains ouvrages était belle alors cela donne le besoin, cela crée l’envie de voir par soi-même comment ça marche le bouquin de celui-ci, de celui-là, enfin le produit à Félix (ou Zézette, l'épouse X), l'œuvre de machin, de truc, d’un tel lectuel.

      

    Il faut que je me décide donc à me gaver d'un auteur. Dans un rayon rangé à ma hauteur, à mon auteur, je prends le livre, l’instrument de ma joie, celui que je vois si beau, si doré et brillant, celui qui me frappe les yeux et m’en bouche deux coins. Il me chante l’amour de sa couverture allègre, et à ce titre, je commence à aspirer sa lectance. Je vais partager une vie, des angoisses, des émotions dans mon ouvrage et je vais prendre mon pied. Jusqu’à demain peut-être m’évader, enfin. Je vais l’aimer ou le détester mon petit auteur à moi. Aux premières pages lues, je saurais s’il est l’auteur de ma vie, le seul à me faire m’échapper ailleurs. La réalité, je la trouve si laide que j’ai besoin d’aller ailleurs et de m’inventer (grâce à cette substance autorisée et licite qu’est un livre) un monde où je voudrais tant vivre. Pour que mon esprit ne se fatigue pas de trop, je laisse mon auteur penser pour moi, je ne suis qu’un petit devant les grandes idées de mon auteur, alors qu'il pense pour moi.

      

    Pansez-moi, docteur, je médite enfermé avec mon livre, son livre, et je ne veux que la paix, paix intérieur avec un ouvrage à lire. Je m’en fais désormais ma joie, ma vie, ma petite existence des milliers de mots où je me noie.

     

    Des livres et moi, délivrez-moi.

     

     

     

     

     


    11 commentaires


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique